Marie-Hélène Le Ny |
1997/2000 |
photographe |
Agitée
d'un incessant grouillement, la vie de la cité ne s'interrompt
jamais. Arpentée dès avant l'aube par des travailleurs
transhumants, son ventre regorge de souterrains où résonne
le vacarme assourdissant des rames de métro qui assurent
quotidiennement des milliers de déplacements anonymes.
Ses artères aériennes, encombrées d'innombrables
véhicules, se développent et se ramifient, remodelant
constamment la figure de la ville. Le 20ème siècle
a été celui de la vitesse qui s'est imposée
dans tous les aspects de la vie quotidienne, et la cité
recherche l'amélioration constante de la circulation des
êtres, des marchandises, et aujourd'hui des communications.
Le citadin, sous la pression de multiples sollicitations, tend
à tout accélérer pour réussir à
en satisfaire le maximum. Il ne marche plus, il court, roule,
pédale. Il mange debout, en marchant, conduisant, téléphonant...
Plus rapide, il se voit plus efficace, satisfait de décupler
sa productivité personnelle. Dans la ville, la vie défile
comme un film en accéléré. La foule, le
mouvement, les lumières, la vitesse et le bruit s'épousent
en d'inextricables images kaléidoscopiques, aux trajectoires
imprévisibles. Même pendant ses loisirs, le métropolitain
est pressé, rapide et efficace - parfois stoppé
par d'interminables files d'attente ou embouteillages... Les endroits
tranquilles ou déserts se raréfient, même
les musées - arpentés par des groupes de touristes
en transit, ne permettent plus que rarement la contemplation
sereine. Certains grands cimetières urbains sont aussi
devenus des lieux de promenade fréquentés. Après
avoir oblitérée la présence de la mort dans
la vie quotidienne pour la reléguer derrière les
murs de l'hôpital ou à l'intérieur du poste
de télévision, le citadin - flâneur ou touriste,
déambule entre les tombes d'inconnus plus ou moins illustres
avec la pugnacité d'un chercheur de trésor en quête
de nouvelles découvertes, rarement saisi de mélancolie.
Les jardins - dits "publics", sont eux aussi envahis
par des nuées d'individus en manque d'air pur et d'une
nature contrastant, par sa vitalité et ses couleurs, avec
les murs qui dans la cité, ne cessent d'arrêter
le regard. Se rappeler qu'il y a l'infini du ciel au-dessus des
toits, que la nature - même clôturée, fourmille
d'odeurs et de vies peu soucieuses du tintamarre des humains.
Promener son chien ou ses enfants, nourrir les canards ou les
pigeons, voire même s'amuser des facéties de l'éléphant
du jardin zoologique ou du cirque sont des activités qui
reposent du mouvement bruyant de la rue et du grouillement affairé
de la foule. |