photographiste

« Pour aller aux sources du langage, c'est intéressant de comprendre comment l'enfant entre dans la langue. L'enfant entre dans le langage par ses interactions avec les adultes et les enfants qui l'entourent. Petit à petit, il va former des énoncés beaucoup plus élaborés, simplement parce que, au niveau cognitif, il en a la capacité, et parce que le modèle autour de lui l'entraîne à complexifier ses énoncés. Ma thèse a porté sur comment l'enfant apprend à dire "je" en français et en langue des signes, et puis ensuite comment l'enfant se positionne par rapport à l'autre et marque sa subjectivité. Pour observer ce que font les enfants en milieu naturel, je suis allée filmer des enfants dans leurs familles. Afin de mieux comprendre l'acquisition du langage j'ai travaillé non seulement avec des linguistes de spécialités différentes mais également avec des experts des phases successives du développement neurologique, cognitif, et psychique de l'enfant.

C'est le processus du questionnement qui construit l'activité scientifique. Il faut alimenter sa curiosité scientifique, se poser de nouvelles questions, accepter la frustration de ne pas avoir de résultats tout de suite et de passer à la question suivante. Il faut apprendre des autres, construire ensemble un savoir plus riche et le transmettre à la génération suivante. Il y a plusieurs moyens de communiquer l'importance de notre recherche et d'avoir une action sur la société civile quand on travaille sur le langage de l'enfant. Par exemple en expliquant aux professionnels de la petite enfance que c'est très important que les parents immigrés parlent leur propre langue à leurs enfants, puisque l'enfant dépend d'abord des interactions langagières qu'il a avec ses parents. Il ne faut pas trop se préoccuper de l'impact que cela peut avoir sur leur français puisque le plus important c'est d'entrer d'abord dans une langue pour pouvoir entrer dans la langue. »

Aliyah Morgenstern
Professeure de linguistique, Université Sorbonne Nouvelle - Paris 3

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